Si j'étais un Inuk,
je saurais que ce qui guide ma vie, c'est ce qui doit m'arriver,
c'est ce qu'on ne peut prévoir, c'est le destin. Je saurais que peut
importe ce que je fais, c'est lui qui va décider de ce qui
m'arrivera. Je saurais que si demain j'y suis, alors je pourrai
choisir ce que j'y ferai pour suivre mon chemin. Je n'aurais pas peur
du futur, je vivrais le présent.
Si j'étais un Inuk,
je prendrais mes décisions au jour le jour, lorsque viendront mes
besoins, parce que de toute façon, tout ce que je pourrais faire ne
m'aiderais qu'à y répondre. Je prendrais mon ski-doo et mon fusil
pour aller chasser quand j'aurais du gaz et des balles. Je
travaillerais comme chauffeur d'autobus quand j'aurais besoin
d'argent pour m'en acheter.
Si j'étais un Inuk,
je comprendrais les gens qui m'entourent en les observant. Je
comprendrais que c'est de cette manière que mes ancêtres l'ont
fait. Je comprendrais aussi que les gens qui m'entourent n'ont pas
besoin de mon aide pour diriger leurs volontés, tant qu'ils ne me
les auraient pas exprimées. Et je ne tenterais pas d'influencer leur
destin puisque eux-seuls ont le pouvoir de le faire.
Si j'étais un Inuk,
je ne pourrais penser pour quelqu'un, puisque je ne saurais pas ce
qu'il pense ni ce qu'il veut. Je ne pourrais penser au futur non plus
tant que je ne saurais pas ce que j'y voudrais et ce que j'y aurais
comme besoin.
Si j'étais un Inuk,
comment pourrais-je organiser des activités pour des personnes
âgées, je ne peux pas savoir ce qu'ils veulent faire? Et comment
pourrais-je savoir si la mise en place d'un centre de jour pourrait
m'aider moi ou ma communauté? S'il existait et que je voudrais m'y
rendre, il pourrait peut-être m'être utile, comme à ma communauté.
Mais là, je suis
blanc. J'ai mes peurs, celles qui me parlent de moi, mais celles que
j'ai pour vous. J'ai peur de tout, de tout ce qui me prive, de tout
ce qui me manque, de tout ce qui m'arrive, de tout ce qu'on invente,
de tout et de rien, à quelle heure mon bonheur. Je vous dirais que
c'est plus dur encore quand on ne s'arrête pas qu'à soi.
Les études de blancs
sur vos conditions de vie jugent que vous avez besoin d'aide. Je
crois comprendre, par les documents que produisent les organisations
qui vous représentent (paradoxe?) que vous désirez en obtenir. Je
ne pense pas pouvoir vous sauver. Je pense encore moins que le sud va
vous sauver, mais y a-t-il quelque chose que je pourrais faire et que
vous pensez qui pourrait vous être utile? J'aimerais vraiment dire à
la Régie qu'un centre de jour permettrait à votre communauté de
grandir par elle-même et pour elle-même, mais comment puis-je le
savoir? Est-ce que je ne vous nuis pas plus que je vous aide? Parce
qu'il y a des jours où je me demande si je ne vous cherche pas des
bobos.
Et puis d'abord, si
j'étais un Inuk, je n'essaierais pas de me mettre dans votre peau,
ni dans la peau d'un autre. Si j'étais un Inuk, je ne me poserais
tout simplement pas la question.
Guillaume
ps. Pour ceux qui se le demandent: Inuk = être humain; Inuit = pluriel d'Inuk.
Pour poursuivre la
réflexion : En ce monde, Daniel Bélanger
Très bien écrit Guillaume.
RépondreSupprimerTouchant.
à tantôt
danielle